Dans le cadre des modèles d'Univers en expansion, nous allons, par un calcul relativement simple, répondre à la question suivante :
à quelle distance se trouve en ce moment l'objet le plus lointain dont la lumière a eu le temps de nous parvenir depuis le commencement de l'Univers ?
Cette limite spatiale fictive se nomme l'Horizon Cosmologique ou encore Horizon des particules (à ne pas confondre avec l'Horizon des évènements). Tout évènement qui se déroule, ou s'est déroulé en un point situé au-delà de cet horizon n'a pu, et ne peut, encore être observé par nous. Ceci est illustré sur la figure suivante:
Figure 1 : Représentation de l'Horizon Cosmologique dans un Univers en expansion
Ceci nous permet ainsi de définir le rayon de l'Univers observable qui n'est autre que la distance comobile correspondant à l'Horizon Cosmologique.
Pour calculer cette distance, nous repérons le point d'émission et de réception par leur coordonnée spatiale comobile. Nous choisirons notre propre position comme point de réception ($r=0$). Nous supposerons les coordonnées angulaires de ces deux points nulles. En se servant de la métrique de FLRW, on peut obtenir l'équation de la trajectoire du rayon lumineux émis à $t_{1}$ d'un point $r_{1}$, et nous arrivant à l'instant $t_{0}$. Celle-ci est une géodésique nulle :
\begin{equation}
c^{2}\text{d}t^{2}-R(t)^{2}\dfrac{\text{d}r^{2}}{1-kr^{2}}=0
\label{eq1}
\end{equation}
On obtient ainsi la coordonnée $r_{1}$ de la source :
Replaçons-nous dans le cadre de l'évolution de l'Univers. Il existe deux grandes classes de modèles : ceux pour lesquels l'âge présent de l'Univers (ou du moins celui de sa présente phase d'expansion) est fini; ceux pour lesquels cet âge est infini. Autrement dit, pour la première classe (appelés modèles de Big-Bang), on décrit toute l'histoire depuis un instant initial que l'on choisit comme le zéro de l'échelle des temps. Au contraire, l'histoire des modèles à durée infinie empêche de considérer un instant initial. Examinons le cas des modèles de Big-Bang. Puisque leur histoire débute à $t=0$, ils imposent la contrainte : $t_{1} > t_{minimum}=0$. Associons cette contrainte à l'équation \eqref{eq2} : implique-t-elle une contrainte sur la coordonnée spatiale ?
Tout dépend de la convergence ou non de l'intégrale :
\begin{equation}
{\large\int}_{0}^{t_{0}}\dfrac{c\text{d}t}{R(t)}
\label{eq4}
\end{equation}
Si elle converge, elle permet de définir la valeur de l'Horizon Cosmologique. Nous allons maintenant écrire cette intégrale sous une autre forme en remplaçant la variable temporelle par le redshift $z$ :
Le terme $H(z)$ représentant le taux d'expansion en fonction du redshift $z$ est déterminé par l'équation (2) de Friedmann. On peut ainsi l'écrire sous cette forme :
Dans la suite des calculs, nous utilisons la variable $\Omega^{0}_{k}$ qui est déterminée par les variables $\Omega^{0}_{m}$, $\Omega^{0}_{r}$ et $\Omega^{0}_{\Lambda}$ selon :
Nous allons calculer numériquement ces 3 intégrales sous Matlab grâce à la fonction integral. Nous utiliserons la fonction arrayfun qui permet d'exécuter le calcul de l'intégrale pour un ensemble de valeurs contenues dans un tableau 1D. Voici comment elle est utilisée dans l'algorithme :
% Function to integrate
function y = myfunc(x,Omega_m,Omega_r,Omega_l,Omega_k)
y=(Omega_m*(1+x).^(3)+Omega_r*(1+x).^(4)+Omega_l+Omega_k*(1+x).^(2)).^(-1/2);
Nous prendrons dans le programme $z_{e}$ égal à $1100$ car ceci correspond à l'époque du découplage entre la matière et le rayonnement.
Figure 2 : Valeur de l'Horizon Cosmologique pour $z_{e}=1100$ dans les 3 modèles
La courbe rouge est celle dont les paramètres cosmologiques ($\Omega^{0}_{m}=0.3$, $\Omega^{0}_{\Lambda}\simeq 0.7$ et donc $\Omega^{0}_{k}\simeq 0$, c'est-à-dire un espace euclidien) correspondent au modèle standard (modèle $\Lambda\text{CDM}$). En convertissant en années-lumière ($1\,\text{pc} = 3.26\,\text{a.l}$), nous obtenons à $z_{e}=1100$, avec $H_{0}=71 \text{km/s/Mpc}$, une valeur du rayon de l'Univers observable égale à : $R = 1.343\,10^4\,\text{Mpc} = 43.8\,\text{G a.l}$, soit environ $\mathbf{44}$ Milliards d'années-lumière.
La Distance Diamètre Angulaire correspond à la distance qu'avait l'objet par rapport à nous lors de l'émission à $t_{1}$ du rayon lumineux qui nous arrive aujourd'hui à $t_{0}$. Autrement dit, elle est égale à :
Concernant la Distance Diamètre Angulaire $D_{a}$, on s'aperçoit qu'il y a un paradoxe : si l'on prend 2 galaxies de redshifts $z_{1}$ et $z_{2}$ tels que $z_{2}>z_{1}$, alors celle qui est la plus éloignée aujourd'hui ($\text{galaxie}_{2}$) apparaîtra plus grande dans le ciel que celle qui est la moins éloignée actuellement ($\text{galaxie}_{1}$). Ceci est du au fait qu'à partir des valeurs de $z_{max}$ indiquées sur la figure ci-dessus, l'Horizon Cosmologique croît moins vite que le facteur $(1+z)$, ce qui produit une valeur $D_{a}$ décroissante pour $z>z_{max}$ dans chacun des 3 modèles.
Le temps de regard vers le passé correspond au moment de l'émission de la lumière d'un objet astronomique par rapport à l'observateur qui reçoit ce rayon lumineux. L'origine "0" pour ce temps est définie comme le temps cosmique d'aujourd'hui coté observateur (redshift z=0). On dit aussi qu'il est égal à la différence entre l'âge de l'Univers et l'âge de l'Univers lors de l'émission ou encore qu'il représente le temps de voyage du photon. Son expression générale est la suivante :
Par exemple, un objet ayant un temps de regard vers le passé de 10 Milliards d'années signifie que le photon a voyagé durant 10 Milliards d'années avant de parvenir jusqu'à nous, ou que l'émission de ce photon a eu lieu il y a 10 Milliards d'années. D'après l'image ci-dessous, le photon reçu aura alors un redshift égal environ à 2 dans le modèle ΛCDM ($\Omega^{0}_{m}=0.3$, $\Omega^{0}_{r}=10^{-4}$ et $\Omega^{0}_{\Lambda}=0.7$).
Figure 4 : Temps de regard vers le passé en fonction du Redshift
En pratique, quand l'observateur reçoit la lumière d'un objet et calcule son redshift, il peut directement en déduire, d'aprè la figure 4 ci-dessus, le temps de regard vers le passé. L'observateur sait alors qu'il voit cet objet tel qu'il était il y a "la valeur" de ce temps.